Genèse et mutation du aounisme… Sandra Khawam

Aussi absurde que cela puisse paraitre, nous devons la genèse du aounisme, une catastrophe nationale qui a pratiquement ruiné le pays , à la disparition de Bachir Gemayel, un héros national et bien sûr à la l’hostilite d’Amine Gemayel pour la promesse que représentaient les FL et celle de Samir Geagea .
Côté Amine Gemayel ,les dessous de la passation du pouvoir à Aoun sont connus de tous. Mais pourquoi le personnage de Aoun a t-il attiré les foules? Pourquoi cet engouement pour ce personnage en particulier? Revenons rapidement sur les faits et sur un point précis tiré de la psychologie de masse.

En août 1982, soit plus de 7 ans de “rounds” sanglants intercalés de cessez-le-feu plus ou moins longs, un jeune lion courageux conquiert la présidence et tous les coeurs des chrétiens : Bachir.
Mais ce rêve ne durera pas longtemps et se brisera brusquement un jour de septembre, trois semaines après son élection. Trop tôt, trop jeune, l’âge du Christ, une promesse enterrée…tous ces éléments réunis font de ce drame un traumatisme collectif.
Le peuple est sous le choc et ne s’en remettra pas .Beaucoup ,par déni, ne voudront même pas y croire et les rumeurs les plus farfelues circuleront sur sa disparition prématurée comme celle affirmant l’avoir vu dans une voiture fuyant l’attentat ou refugié dans un lieu tenu secret.
Amine accède au pouvoir et son mandat sera une déception ( prévisible ) pour tous. Deux frères que tout sépare sauf le nom.
Entre en scène un général venu de nulle part comme il y en a des dizaines, et qui adopte l’attitude d’un chef ,plagie le livre de Bachir, ses mots , son attitude, gestes et posture ,sans en posséder toutefois l’esprit. Mauvais copieur, il modifie et reprend à son compte le nom des ahrah, s’autoproclame président, pique les couleurs de la révolution ukrainienne, etc.

Il incarne le rêve de tous les chrétiens: la force protectrice jointe à la légalité.
Le peuple orphelin, en manque de père et donc de re(père) n’y verra que du feu et se laissera adopter par ce faux chef, faux père. La grande imposture du Liban commencera en 88 et durera plus de 30 ans. Il se fera aussi passer pour un mélange de Napoléon et de De Gaulle, pour le Sauveur des chrétiens, pour un super papa, le Père de tous. Il s’essayera à tous les rôles, trahira mille fois et enfoncera sciemment le pays dans un enfer dantesque. Le monde autour de lui s’écroule? Certainement, mais ce monde n’existe pas. Après tout il est le monde et le monde c’est lui.
Le passé est passé, l’erreur est humaine, universelle. L’Histoire de toutes les nations est faite d’échecs et de succès. Le passé est dépassé à condition qu’on en tire des leçons pour l’avenir.

Et la question qui se pose est la suivante : avons-nous ( réellement) fini du aounisme ou est-ce simplement le rejet de X ou de Y qui nous fait dire que le aounisme est en fin de parcours? Le mal ne serait-il pas bien plus profond ?

Je crains parfois que nous soyons devant une mutation d’un virus libano-libanais qui, certes à atteint sa plus grande virulence ces dernières années, mais n’a muté que contraint à cause de l’échec du aounisme et n’a peut-être pas dit son dernier mot.

N’oublions pas qu’en 1988, les partisans de Michel Aoun étaient “la société civile” de l’époque et par réclamation de la “légalité”….
Affaire donc à suivre …et de près.

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